Présentation du Diplôme universitaire
« Organisations et juridictions pénales internationales » de l’Université Paris Ouest-Nanterre La Défense
* Entretien réalisé par Élise Le Gall de Madame Marina Eudes, Maître de conférences HDR en Droit public, Université Paris Ouest – Nanterre la Défense, co-fondatrice du DU Organisations et juridictions pénales internationales.
Question 1 : Qu’est-ce que le DU Organisations et juridictions pénales internationales ? Quelle est la différence avec un master II ?
Le DU OJPI est une formation de niveau bac + 5 consacrée au droit international pénal /droit pénal international, c’est-à-dire visant principalement les professions exercées au sein et autour des juridictions pénales internationales. La distinction entre un DU et un M2 repose d’abord sur le fait que le premier est une formation propre à une université, en l’occurrence celle de Nanterre, et non un diplôme habilité et délivré au niveau national. L’autre différence réside dans la grande souplesse de création et de gestion (notamment grâce à l’autofinancement) du DU par rapport au M2. En dehors de ces nuances d’ordre administratif, ce sont des formations tout à fait équivalentes du point de vue pédagogique, avec toutefois une visée professionnalisante accentuée pour le DU par rapport à un M2 classique.
Question 2 : Quelle est la genèse de ce projet de création du DU Organisations et juridictions pénales internationales (Comment et pourquoi l’idée vous est venue de créer ce diplôme ? ).
Avec ma collègue Florence Bellivier, nous dispensons depuis plusieurs années un cours de Master I sur les « aspects internationaux du droit pénal ». De nombreux étudiants nous consultaient régulièrement sur les perspectives d’études spécialisées dans cette discipline et nous étions bien obligées de les diriger vers des universités étrangères, aucune formation spécifique n’existant en France. Cette préoccupation a rapidement trouvé un écho lors d’échanges nourris avec Michel Raffray et Olivier Beauvallet, deux magistrats ayant connu diverses expériences professionnelles à l’étranger et ayant pu constater la sous-représentation et le manque de compétences des juristes français au sein des organisations et juridictions pénales internationales. Nous avons alors décidé de créer ensemble le DU OJPI pour répondre à une vraie lacune française, dans un contexte international marqué par la montée en puissance du droit international pénal, qu’il soit substantiel ou procédural. Le même constat avait d’ailleurs été exprimé par la Commission nationale consultative des droits de l’homme dans son Avis de 2012 sur la Cour pénale internationale.
Question 3 : Qui peut faire acte de candidature à ce DU ? À quelle période de l’année ?
Nous tenons à constituer des promotions mixtes, c’est-à-dire composées d’étudiants issus de Masters 1 ou 2 (en droit pénal et/ou droit international) et de professionnels aux parcours variés (avocats, membres de juridictions ou d’autres structures publiques, salariés d’ONG, etc.). A terme, nous aimerions que chaque promotion soit composée d’une dizaine d’étudiants et d’une dizaine de professionnels, ces derniers étant pour l’instant un peu moins représentés. L’émulation et les apports réciproques entre ces deux catégories de personnes est indéniable et constitue une vraie valeur ajoutée par rapport à des formations classiques.
Les candidatures doivent être présentées en avril/mai, les dossiers étant ensuite examinés pour une sélection des candidats devant se présenter à un entretien début juillet. La décision concernant la sélection définitive est communiquée mi-juillet, sachant que les enseignements commencent début octobre.
Question 4 : Visant un public à la fois d’étudiants et de professionnels, peut-on considérer que ce DU favorise la création d’un premier réseau diversifié au sein de chacune des promotions de ce DU ?
C’est en effet l’un des autres effets attendus de la composition mixte de nos promotions : étudiants et professionnels échangent sur leurs expériences respectives, développent un vrai esprit de camaraderie, des liens forts se tissent durant une année particulièrement chargée et nous espérons qu’ils se poursuivront par la suite. A cet égard, la création, cet automne, d’une association des anciens est aussi révélatrice du souci des premiers diplômés de rester en contact entre eux, mais aussi d’échanger avec les promotions suivantes.
Question 5 : Pouvez-vous donner un ou deux exemples de profils suivant ce DU ?
L’année dernière, la toute première promotion comportait deux professionnels (issus d’une ONG et du milieu syndical), le reste étant des étudiants pénalistes ou internationalistes, dont certains suivaient parallèlement au DU un M2 en droit international ou en droit des droits de l’homme. Cette année, les professionnels, plus nombreux, sont tous avocats, à l’exception d’un rapporteur à la Cour nationale du droit d’asile.
Question 6 : Comment s’organise la formation ? Existe-t-il un mariage entre théorie et pratique, cours magistraux et mise en situation ?
Comme vous pouvez le voir sur la plaquette du DU, cette formation comprend en effet des enseignements « théoriques », plutôt dispensés par des universitaires, et des enseignements « pratiques », qui bénéficient de l’expertise d’avocats et de membres de juridictions pénales (CPI et TSL). Mais il n’y a pas de cours à proprement parler, tout se faisant sous forme de séminaires, c’est-à-dire de séances interactives où les étudiants prennent la parole, en présentant des exposés et plaidoiries, et doivent débattre entre eux et avec l’enseignant. Plusieurs simulations, notamment une audience devant la Cour pénale internationale, sont organisées au cours de l’année.
Question 7 : Les cours ayant sans doute commencé, comment qualifieriez-vous la relation entre les étudiants/corps professoral et étudiants/intervenants extérieurs ?
Les échanges, avec les intervenants extérieurs comme avec les enseignants, sont beaucoup plus directs et personnalisés que dans le cadre des formations universitaires classiques. Sur ce point, nous essayons de nous détacher du modèle académique français et de nous rapprocher du modèle anglo-saxon, où les relations entre enseignants et étudiants sont facilitées. Les échanges entre étudiants eux-mêmes sont également plus poussés que dans des études classiques, car ils doivent beaucoup travailler ensemble, l’essentiel des devoirs, rapports écrits et présentations orales devant être préparés à plusieurs.
Question 8 : Quelle est /quelles sont vos principales ambitions pédagogiques derrière ce DU ?
A travers des méthodes pédagogiques originales, nous cherchons à développer le sens critique et la capacité d’organisation des étudiants, à leur inculquer de nouvelles méthodes et techniques (préparer un mémoire devant la CPI, débattre en anglais, rédiger une note technique pour une organisation internationale, etc…). A cela s’ajoute le fait qu’ils vont évidemment apprendre beaucoup sur le droit international pénal/droit pénal international. L’objectif est donc de les préparer de façon très concrète à ce qui peut leur être demandé dans le cadre d’un stage ou emploi au sein d’une organisation ou juridiction pénale internationale, et ce, y compris dès le stade de l’entretien de sélection/d’embauche.
Question 9 : Le DU se veut-il être un tremplin vers l’insertion des étudiants dans le monde des organisations et juridictions pénales internationales ?
Oui, bien sûr. Comme dit précédemment, tout a été pensé dans le DU pour préparer au mieux les étudiants à décrocher un stage ou un emploi dans cet univers professionnel, qui requiert à la fois de solides connaissances théoriques, une grande capacité d’organisation et de travail à seul ou en groupe, des compétences techniques diversifiées et une aisance pour s’exprimer en anglais.
Question 10 : Quelle est pour vous, l’actualité juridique internationale qui mérite une attention particulière en ce moment ?
Toutes les décisions prises par la Cour pénale internationale méritent une attention particulière en ce qu’elles illustrent la construction et le renouvellement permanents du droit international pénal. Si le droit matériel s’enrichit évidemment avec l’adoption de chaque décision au fond, c’est surtout du point du vue du droit procédural, ou institutionnel, que les avancées les plus importantes se font en ce moment. Par ailleurs, du point de vue de l’actualité juridico-politique, les diverses modalités de réaction de la communauté internationale aux actuelles crises majeures traversées par certains Etats et régions doivent être attentivement observées et analysées.
Questions sur la promotion actuelle :
Combien sont-ils ?
17 étudiants
Événements à venir ?
Conférence de l’ancien juge à la CPI, Bruno Cotte, jeudi 6 novembre à Nanterre (http://www.sfdi.org/actualites/universite-paris-ouestcedin-conference-de-m-bruno-cotte/).
Nous sommes également en train de monter une conférence le samedi 6 décembre au matin avec des membres du Pôle des crimes internationaux du TGI de Paris (procureur et juge d’instruction).
Lectures à conseiller ?
Les étudiants intégrant le DU se voient distribuer une bibliographie générale dès le mois de juillet (en fait, la bibliographie de notre cours « Droit pénal, aspects internationaux » de M1, puis chaque enseignant/intervenant distribue sa propre bibliographie axée sur son séminaire. Cela représente donc plusieurs dizaines de références de manuels et articles. Parmi elles, il faut notamment signaler la chronique de jurisprudence des juridictions pénales internationales, à laquelle contribuent deux enseignants intervenant dans le DU, Julian Fernandez et Anne-Laure Chaumette, dans le prochain numéro de l’Annuaire français de droit international. Et bien évidemment, les excellentes Chroniques internationales collaboratives ! On pourrait aussi citer la chronique de Beauvallet, Raffray, Sarliève et alii, « Un an de droit pénal international », dans la Revue Droit pénal.
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